Interview Docteur Eugénie Gambier

Interview Docteur Eugénie Gambier

1. Pouvez-vous partager brièvement votre approche et votre expérience

dans le traitement de l'endométriose en tant que gynécologue?

J’ai obtenu le diplôme national sur la prise en charge de l’endométriose

et de l’adénomyose, et j’ai eu la chance via ce diplôme d’être formée par

des médecins avec une grande expérience dans le traitement de

l’endométriose. Cela me permet d’avoir une approche fondée sur des

connaissances solides concernant l’endométriose. Tant sur le plan

théorique, que sur le plan des différentes recherches et traitements

récents qui ont pu faire leurs preuves.

Les douleurs pendant les règles ont pendant trop longtemps été

banalisées, occasionnant une grande souffrance et solitude pour les

patientes alors incomprises et non entendues par l’entourage et les

professionnels de santé. C’est une maladie inflammatoire chronique qui

touche 10% des femmes et qui présente de nos jours un retard

diagnostique d’une durée de 7 ans. Lorsque je vois les patientes, j’ai à

cœur de les écouter et surtout de les entendre. Entendre et agir, car elles

ont souvent besoin d’avancer après toutes ces années de « errance »

médicale.

2. Comment diagnostiquez-vous l'endométriose et quelles sont les options

de traitement que vous privilégiez généralement?

Le diagnostique de l’endométriose est avant tout clinique. Ensuite, je

propose de réaliser une échographie pelvienne au cabinet à la recherche

de lésions d’endométriose. Malheureusement, l’échographie est parfois

insuffisante pour évaluer précisément les localisations des différentes

lésions car ces dernières sont souvent très petites, de l’ordre de

quelques millimètres. Je complète donc souvent mon examen par une

IRM pelvienne chez un radiologue. Ensuite, je passe à une phase

d’explications, de schémas, je leur explique où se trouvent leurs lésions,

et quelles lésions sont responsables de leurs symptômes.

Concernant les traitements, je suis avant tout dans un premier temps à

l’écoute des souhaits et des vécus antérieurs des patientes. C’est un

travail d’équipe entre professionnels de santé, et c’est la mise en place

de plusieurs prises en charges différentes qui permet souvent de

soulager les patientes (Diététicienne pour une alimentation anti

inflammatoire, Kinésithérapie, Ostéopathie, Naturopathie, Compléments

alimentaires à base de plantes et probiotiques, Sophrologie,

Acupuncture ...)

3. Quels sont les principaux défis que vous rencontrez lors du traitement

de l'endométriose et comment les surmontez-vous?

Le premier défi est surtout de permettre à la patiente de retrouver une qualité

de vie et un quotidien semblable à celui d’une femme qui n’est pas atteinte de

la maladie. Chaque femme est différente, et il faut parfois essayer plusieurs

options avant de trouver le traitement parfaitement adapté à la patiente.

4. Pouvez-vous partager un exemple de succès ou de traitement efficace

que vous avez rencontré dans la gestion de l'endométriose?

C’est vraiment encourageant car je vois très nettement des patientes qui

reviennent 3 mois après avec un grand sourire, apaisées, et soulagées.

Je ne pourrai donner un exemple de traitement efficace, car ce sont

vraiment des décisions thérapeutiques que je prends au cas par cas,

selon les antécédents, les besoins, les souhaits des patientes.

J’ai des patientes qui voient leurs lésions d’endométriose totalement

régresser après avoir trouvé le traitement qui leur correspond. C’est une

belle source de motivation.

5. Comment collaborez-vous avec d'autres professionnels de la santé, tels

que les chirurgiens, les spécialistes de la douleur, ou les psychologues,

dans la prise en charge globale de l'endométriose?

L’endométriose est une pathologie clairement pluridisciplinaire. Dans

certaines situations, lorsque les traitements médicaux ne suffisent pas,

j’oriente alors les patientes pour une prise en charge chirurgicale. Les

centres anti douleurs peuvent également beaucoup nous aider lorsque

les mécanismes de douleur chroniques se sont installés. La

psychologue joue également un rôle important, car comme pour toute

maladie chronique, c’est un long parcours pour les patientes et

l’entourage, et parfois cela fait du bien de pouvoir en parler à un

professionnel.

6. Quels conseils donnez-vous aux patientes concernant l'endométriose et

leur prise en charge?

Je leur conseille d’impliquer l’entourage le plus possible pour qu’elles ne se

sentent pas seules dans ce combat. Je leur explique qu’à présent elles sont

prises en charge, et qu’on fera tout pour que cela se passe au mieux et pour

avancer.

7. Enfin, comment envisagez-vous l'avenir du traitement de l'endométriose

et quels sont vos espoirs pour l'amélioration des soins dans ce

domaine?

J’aimerais créer un parcours ETP « Education Thérapeutique du Patient » sur

l’endométriose au sein de la MSP PPS de Bormes les Mimosas. Cela

permettrait aux patientes de participer gratuitement à des ateliers sur

l’endométriose. On proposerait plusieurs ateliers pour mieux comprendre la

maladie, mieux vivre avec la maladie, adopter une alimentation anti

inflammatoire à visée antalgique, discuter de la sexualité et de la fertilité, et

enfin un atelier pour donner des outils pour une meilleure gestion de la

douleur. Ce programme serait soutenu par l’ARS.

L’endométriose est une maladie qui peut évoluer et il est essentiel de les

diagnostiquer tôt, dès l’adolescence, afin de contrôler son évolution du mieux

que l’on peut. Le fait que l’on en parle de plus en plus, que l’on forme les

infirmières scolaires, permet de réduire ce temps avant le diagnostique.

Je pense que nous avançons dans le bon sens, que le travail d’équipe, le

soutien, l’accompagnement de la patiente est la clé pour améliorer les soins

dans ce domaine.